Mathieu Doumenge
15 févr. 2024
Le salon Wine Paris & Vinexpo Paris ferme ses portes ce soir après trois jours de rendez-vous professionnels dont le succès confirme que la capitale française s'impose comme une nouvelle place forte du business du vin. Les spiritueux ne sont pas en reste, avec un espace "Be Spirits" qui ne cesse de s'étoffer.
Ce n'est plus un secret, l'univers des spiritueux est en pleine explosion. Même le concours de Meilleur Sommelier du Monde, qui a récemment consacré Raimonds Tomsons, exigeait des candidats d'avoir des connaissances solides en la matière, tout comme en mixologie. Ce secteur en pleine effervescence s'appuie sur une forte assise de grands groupes historiquement leaders (Diageo, Pernod-Ricard, Beam Suntory...), sur un essor considérable du craft (ces distilleries artisanales et indépendantes qui éclosent aux quatre coins du monde), sur une nouvelle dynamique autour des bartenders et de leur créativité, mais aussi de tendances qui ne cessent de se renouveler, du Low Alcohol au Ready To Drink en passant par les alcools japonais, l'ultralocal, les alcools d'agave mexicains, etc.
Cet état des lieux était particulièrement prégnant lors des trois jours du salon Wine Paris & Vinexpo Paris, qui ferme ses portes ce soir à la Porte de Versailles. L'espace "Be Spirits", intégralement dédié aux spiritueux et installé dans le Hall 2 du Parc des Expositions parisien, ne cesse de gagner en ampleur et en visibilité : 160 exposants y sont réunis cette année, dont un tiers d'étrangers, et le fameux Infinite Bar déclinant le savoir-faire combiné de différentes marques et bars à cocktails ne désemplit pas. En slalomant entre les stands, on relève bien la présence de toutes les grandes tendances citées plus haut, mais aussi l'offensive du rhum et du cognac qui occupent largement le terrain.
L'armagnac n'est pas en reste. Avec un stand très original, entre le speakeasy et la fausse pharmacie "Vital Dufour" (l'ecclésiastique qui, au XIVème siècle, venta les 40 vertus de l'aygue ardente), le BNIA confirme la belle dynamique actuelle autour de l'eau-de-vie gasconne, dont la diversité et l'authenticité sont les atouts majeurs. Après avoir consacré les dernières années à un gros travail de fond pour changer l'image du produit, l'interprofession entend désormais "faire moins mais mieux" en mettant le paquet sur le plan Armagnac 2030, en renforçant la stratégie de pédagogie auprès des professionnels, et en doublant le volume de distillation en trois ans, conformément aux souhaits du nouveau président Jérôme Delord. Une dégustation des différents échantillons présents sur le stand permet de s'assurer de l'incroyable éventail de profils et de saveurs que l'armagnac est capable de déployer, avec notamment de jeunes opérateurs comme Horgelus, les frères Laffitte, mais aussi des maisons renommées comme Veuve Goudoulin, Fontan, Arton, ou le Domaine d'Espérance. À noter que, dans le cadre des prix remis par le média professionnel Cavistes et E-commerce en marge de Wine Paris, deux maisons d'Armagnac ont été récompensées : Dartiguelongue pour sa démarche écoresponsable avec son armagnac "Organic", et Laubade pour son innovation avec sa cuvée "XF" élevée en fûts sous chauffe extra-forte.
Le whisky français a également le vent poupe. Armorik, le single malt de la distillerie Warenghem dans les Côtes-d'Armor (dont nous vous parlions il y a quelques jours à l'occasion de Millésime Bio), a ainsi vu son single malt 15 ans (89 €) récompensé du prix du meilleur whisky lors des mêmes trophées remis par Cavistes et E-commerce. Un bel accomplissement pour un spiritueux français qui doit faire sa place face aux poids lourds écossais ou irlandais. Armorik, qui fête cette année ses 25 ans et a vu une partie de sa gamme passer en bio il y a deux ans, inaugurera en avril sa propre tonnellerie, et envisage à terme de se doter de sa propre malterie. Une décision qui a été prise de longue date par une autre figure de proue historique du whisky français, Rozelieures. La maison basée depuis six générations en Meurthe-et-Moselle produit du whisky depuis le début des années 2000. Avec 300 hectares de céréales dont un-tiers consacré à l'orge, elle gère à 100% ses approvisionnements pour le whisky, et opère elle-même son maltage grâce à son unité inaugurée en 2017. Elle se veut autonome en énergie à 80%, a lancé il y a quinze ans une unité de méthanisation en partenariat avec des éleveurs voisins, et achève sa troisième année de conversion bio sur une cinquantaine d'hectares. En moins de vingt ans, la gamme de Rozelieures s'est bien installée dans le paysage du whisky, et ne cesse de se réinventer : le lancement en 2021 de "parcellaires" exprimant l'identité de l'orge sur différents types de sols, à la manière du vin, a remporté un grand succès auprès des amateurs. Ce printemps verra la sortie d'un délicieux single cask tourbé vieilli en fût de Jurançon (environ 60 €) ainsi qu'un brut de fût, en attendant à la rentrée un nouveau single malt taillé pour la mixologie.
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